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Mesurer pour compter, compter pour raisonner et décider, l'opération de mesurage était jusqu'à la révolution un exercice des plus complexes tant les mesures de références étaient nombreuses et variées. Chaque commune avait ses propres échelles et unités. Le foisonnement des mesures et leurs fantaisies étaient un frein à l'essor du commerce.
Le Languedoc n'échappait pas à la règle. Louis XII dans un Édit donné à Lyon en juillet 1501 prescrivait l'adoption et l'usage des poids et mesures de Montpellier pour tout le Languedoc. Le projet, qui fut longuement discuté par le syndic des États du Languedoc, se heurta à la susceptibilité des Capitouls. De requêtes en plaidoyer, d'assignations en comparutions, l'affaire dura plusieurs années. Ni la toute-puissance du lieutenant principal du gouverneur de Montpellier domaine royal, ni les sentences et injonctions des commissaires du roi ne feront plier les Capitouls qui conserveront leurs poids et mesures.
Les poids et mesures relevaient de leur police. Ils détenaient au Capitole un exemplaire de référence ou mesure étalon de toutes celles utilisées dans la ville. Tous les négociants et marchands devaient utiliser des aulnes ferrés aux deux extrémités et des poids et mesures étalonnés et marqués. Accompagnés d'une escouade du guet, les Capitouls visitaient les marchés pour s'assurer de la conformité des mesures et saisissaient à cette occasion les non conformes. Ils étaient destinataires des plaintes et dénonciations et pouvaient contrôler les commerçants chez eux. Ils étaient en droit d'infliger des peines d'amendes aux contrevenants.
L'uniformité des poids et mesures fera l'objet de plusieurs autres Ordonnances, mais il faudra attendre la révolution et les lois des 14 thermidor an I (1er août 1793), 18 germinal an III (7 avril 1795), 13 brumaire an IX (4 novembre 1800) et l'Ordonnance du 18 décembre 1825 pour que l'unification et la nationalisation des poids et mesures deviennent une réalité incontournable.
Lettre du préfet de la Haute-Garonne adressée aux sous-préfets et maires du département.
Toulouse
le 15 pluviôse, l'an 9 de la République française.
Citoyens, les consuls de la République,
pénétrés de l'avantage qui doit résulter
pour
tous les Français de l'uniformité des poids et mesures,
ont ordonné que le nouveau système soit d'obligation
à compter du Ier vendémiaire prochain. Peu de temps
suffira aux esprits les plus prévenus, pour se convaincre
combien ce système est supérieur aux usages qu'on a
suivis jusqu'à ce jour. Le mètre sera une mesure
invariable pour toute la France, au lieu que la canne, cette mesure
seulement connue dans une partie de la France, a huit longueurs
différentes dans le seul département. L'are sera le
même partout. La pugnère était de sept contenances
différentes dans le département, selon les communes.
Pour faciliter l'établissement de ce nouveau système, on
a permis d'appliquer les anciens noms aux nouvelles mesures ; mais il
est indispensable que les mesures dont on se servira soient celles
adoptées par le Gouvernement. Quelque nom qu'on leur donne, vous
devez prévenir tous ceux qui ont des poids ou des mesures,
qu'ils sont dans l'obligation de s'en procurer de nouveau avant le Ier
vendémiaire ; qu'à cette époque, il sera fait des
visites chez tous les marchands et détailleurs, et que les poids
et mesures conformes à l'ancien usage seront saisis.
Vous voudrez m'accuser la réception de ma lettre.
Je vous salue.
J.E RICHARD
Le pied de France, également appelé pied de roi, mesurait 12 pouces. Le pied géométrique se présentait sous la forme d'une règle subdivisée en sous unités mais dont la longueur variait suivant les lieux.
Ancien système | Système métrique |
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La toise est en usage à Paris. La mesure
étalon conservée au Châtelet est divisée en
72 pouces.
Ancien système | Système métrique |
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Cette mesure était utilisée par les drapiers. Par Édit d'avril 1540 donné à Évreux, François Ier exigea pour éviter tous les abus, fautes et fraudes que l'aunage serait uniforme dans le royaume. Cette unité fut nommée « aulne du roy ». D'abord en usage sur les terres du roi, un Édit du 20 juillet 1543 donné à Paris, enjoint de se servir de la même mesure dans tout le royaume. L'aune étalon était déposé au bureau des marchands merciers.
Valeur et sous-multiples de l'aune | Système métrique |
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Cette mesure était utilisée dans le sud du royaume, dont le Languedoc. La canne du Haut-Languedoc (Toulouse) était plus courte que celle du Bas-Languedoc (Montpellier) et il en existait un très grand nombre variétés. Pour le seul département de la Haute-Garonne, on comptait huit mesures différentes. La canne de Montpellier mesurait 6 pieds 2 lignes soit 866 lignes et celle de Toulouse était de 5 pieds, 6 pouces, 8 lignes soit 800 lignes. La canne de Nîmes était plus courte d'environ 1 pouce par rapport à celle de Montpellier.
Suivant l'Arrêt du 13 avril 1734, le Parlement du Toulouse enjoint aux commerçants du Languedoc de mesurer avec l'aune de Paris et leur défendit de mesurer à la canne cependant, les particuliers continuaient d'acheter à la canne.
Sous-multiples de la canne de Toulouse | Système métrique |
1 m = 0,5568 canne ou 1 m = 0 canne 4 empans 3 pouces 5 lignes 0point |
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Les distances s'exprimaient en lieues, mais cette mesure variait du simple au double suivant les localités. Ainsi la lieue était de 1700 toises en Beauce et 2000 à Paris, en Sologne et en Touraine. En Normandie et en Champagne, la lieue comptait pour 2000 toises, 2285 en Bretagne, 2300 en Anjou et pour 3000 toises en Languedoc.
Ancien système | Système métrique |
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Ancien système | Système métrique |
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Pour les relais de la poste aux chevaux, le ministère des Finances utilisait pour fixer ses tarifs sa propre lieue appelée lieue de poste ou plus simplement la poste*. Elle se divisait en demi-poste et quart de poste. La poste était évaluée à 4400 toises soit 2200 lieues. Malgré cela l'amplitude d'une poste pouvait varier de 500 à 1100 toises. Ainsi Muret se trouvait à 2 postes ¼ de Toulouse. Limoges 41 postes ¾, Tarbes à 17 postes ½, Saint-Gaudens à 10 postes ¼, Paris 90 postes ¾.
Il faudra attendre l'Ordonnance royale du 25 décembre 1839, pour voir l'abandon de la lieue de poste et la mise en place à compter du 1er janvier 1840 du système métrique. Toutes les distances de poste furent alors comptées en myriamètres (10 kilomètres) et kilomètres.
* Les règlements de la poste aux chevaux fixaient le temps du parcours d'une poste entre 40 et 50 minutes au plus. La vitesse moyenne pour les diligences était de 2 lieues par heure (~8 km/h).
Lieue de poste | Système métrique |
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Les distances sur mer se rapportaient à la lieue marine appelée lieue de 20 au degré et au mille marin qui en est le tiers. Cette mesure était utilisée par la plupart des nations maritimes. Cette lieue est la 20e partie d'un degré de méridien ce qui fait correspondre le mille à 1/60e du degré du méridien.
Ancien système | Système métrique |
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Lorsque la longueur et la largeur de la chose mesurée étaient d'égale longueur on exprimait la surface en pouce², toise² etc., mais lorsque la largeur et la longueur correspondaient à des valeurs différentes on parlait alors de toise-pied, toise-pouce, pouce-ligne, etc. La première partie indiquait la longueur, la seconde la largeur.
Les surfaces | Valeurs |
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Pour la canne de Toulouse :
Ancien système | Système métrique |
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Comme pour les surfaces, si les longueur, largeur
et épaisseur du volume mesuré correspondaient à
des valeurs différentes, on utilisait les expressions suivantes :
la toise-toise-pied, la toile-pouce-ligne, etc. Ainsi, 1
toise-toise-pied correspondait à 12 toise-toise-pouces; 1
toise-toise-pouce équivalait à 12 toise-toise-lignes ou
bien encore à 3 pieds cubes, etc.
Les volumes | Valeurs |
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Pour la canne de Toulouse le principe de la
dénomination était le même. Ainsi on appelait une
canne-canne-empan un parallélépipède rectangle qui
avait une canne² de base et un empan de hauteur; une
canne-canne-pouce un volume ayant une canne² pour base et un pouce
de hauteur etc.
Valeurs | Sous-multiples |
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Les mesures de capacité variaient suivant les lieux et les produits mesurés. On distinguait les corps liquides comme le vin, le miel les eaux de vie, etc. et les corps solides à savoir les grains (blé, avoine, millet, chènevis, etc.), mais aussi les fruits tels que les châtaignes, noix, noisettes, poires, pommes, etc., et autres produits comme le sel, le charbon de bois, le charbon de terre...
Pour mesurer tous ces produits, les commerçants utilisaient une mesure appelée boisseaux. Elle se déclinait en différents sous-multiples et valeurs suivants le produit et la région. Ainsi l'emploi des mêmes noms exprimait des quantités différentes en fonction du produit mesuré. Les gros volumes s'exprimaient en muid et setier qui étaient les mesures utilisées pour les comptes. Dans la réalité, les denrées et produits étaient mesurés en boisseaux. Ces mesures se présentaient sous la forme d'un cylindre en bois. Elles étaient formées en roulant une éclisse ou feuille mince de chêne qui était fixée par des clous sur un fond puis renforcées en haut et en bas. Pour les liquides, les mesures également cylindriques étaient exécutées en étain. Une exception demeurait : l'huile qui était vendue au poids.
Exemple d'anciennes mesures et leurs sous-multiples pour denrées sèches en usage à Paris :
Pour le blé | Pour l'avoine |
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Pour le sel | Pour le charbon de bois |
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Suivant l'Édit d'octobre 1669, de nouvelles mesures de boisselleries avaient été réalisées. Les nouveaux étalons étaient des récipients cylindriques dont les dimensions étaient ainsi déterminées :
mesures de boissellerie | hauteur | diamètre | contenance |
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Unités de mesures utilisées dans le Languedoc pour le grain sauf l'avoine :
MONTPELLIER | TOULOUSE |
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1 hectolitre = 1,07226 setier ou 1 setier 2 boisseaux 31/100 |
La mesure rase pour l'avoine à Toulouse
est la pugnère :
Sous-multiple du
setier d'avoine |
Système métrique |
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Les grands volumes | Système métrique |
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Les petits volumes | Système métrique |
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Dans le Languedoc, le muid équivalait à 18 sétiers soit 32 pots ou pechez.
Dans les mesures de vin, il faut distinguer
celles employées pour la vente au détail et celles qui le
sont pour la vente en gros. Les ventes en gros se font à la
barrique ou pièce et au char. Cette dernière mesure
correspondant à la
charrette à 4 roues portant 2 barriques. Cette mesure
était réservée au marchand de vin qui se rendait
chez les producteurs avec ce type véhicule et leurs deux
barriques vides. Le marché conclu, elles
étaient remplies à l'aide de grandes mesures
appelées barrats.
Pour la vente de détail, les mesures utilisées
étaient : l'uchau, le quart, le péga, la juste, le pot,
le petit, le picher, le pouchou etc...
La mesure des liquides utilisées à Toulouse est le
péga dont la capacité est de 159,6 pouces³.
Pour la vente en gros | Système métrique |
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Pour la vente au détail | Système métrique |
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À Bagnères-de-Luchon le péga s'appelle pot, à Villemur le demi-péga s'appelle pinte, à Saint-Nicolas l'uchau est la moitié du pouchou et 2 pouchous font 1 picher qui est égal au demi-péga de Toulouse.
La « voie de Paris » était constituée d'un châssis en forme de "u" de 4 pieds de large et 4 pieds de haut. Les bûches devaient avoir une longueur de 3 pieds six pouces. Une voie était l'équivalent d'un double stère.
La « corde des eaux et forêts » suivant l'Édit du roi d'août 1669, était constituée d'un châssis en U de 8 pieds de large et 4 de hauteur. Les bûches ayant 3 pieds 6 pouces de longueur. Elle est le double de la voie de Paris.
La « corde de bois » était constituée d'une corde mesurant 7 pieds 8 pouces. Les bûches d'une longueur de 3,5 pieds étaient empilées en fagot de façon à pouvoir les enrouler avec la corde. Toutes les bûches contenues dans cette longueur de corde prenaient le nom de corde.
La
« pagelle » était
en usage dans la commune de Toulouse et suivant un règlement
local du 1er
août 1719 et devait contenir une surface de 16 pans². Elle
était constituée d'un cerceau métallique de 4 pans 3 pouces 4 ligne 2/3
de
diamètre. La demi-pagelle avait un diamètre de 3 pans 1
pouce 4 lignes. On
remplissait le cerceau avec des bûches dont la longueur
était de
cinq pans 1/3. Ces marchands se nommaient des pageleurs. 1 pagelle de
Toulouse = 0,94 stère
Dans les autres communes, l'unité de
mesure était la pile, la canne ou le « bûcher ».
La bûcher était un
parallélogramme de hauteur, largeur et longueur variables
suivant les communes. Sa contenance allait de 1,81 à 4,24
stères.
Sur d'autres cantons comme Saint-Gaudens, Cazères ...le bois
était vendu à la canne soit du pays soit la canne de
rivière et les volumes variaient de 3,15 à 8,34
stères. Enfin certains villages utilisaient pour mesure « la
pile » dont la valeur variait de 3,50 à 3,89 stères.
Le charbon de bois était vendu à la « sachée ». C'était un sac pesant 1 quintal poids de table. Les sarments s'achetaient en fagot de cent, les souches et autres petits bois à la charretée.
Le pesage des produits et denrées était également un exercice délicat tant les mesures étaient différentes. On distinguait cependant plusieurs types de mesures dont le poids de marc utilisé à Paris et région du nord, le poids de table ou de ville utilisé dans les provinces du sud, le poids de romaine destiné à peser les choses lourdes ou volumineuses, le poids des joailliers et bijoutiers, le poids médicinal.
Pour les mesures du quotidien, on employait le plus souvent la livre, l'once, le gros et le grain. Le marc était l'unité de poids de l'argent, l'once celui de l'or, le denier (ou dragme) et le scrupule étaient employés qu'en pharmacie. Les diamants se pesaient aux carats.
Cette mesure servait à peser les produits de petit volume ou de faible poids. Introduite vers 1080 sous le règne de Philippe Ier, elle variait suivant les lieux avant d'être réduite à une seule valeur. Les poids étalons servant à cette mesure étaient conservés à Paris à l'hôtel de la monnaie. L'unité était la livre qui se déclinait en plusieurs sous-multiples. Le poids de gramme sera substitué à celui du marc par la loi du 18 Germinal an III. Ainsi :
L'arrêté du 15 brumaire an IX (4 novembre 1800) relatif au
nouveau système des poids et mesures fixa d'une manière
définitive le rapport des nouveaux poids avec les anciens et
rendit l'exécution de ces mesures obligatoire dans tout
l'empire.
Ainsi : 1 kilogramme = 2 livres (ou 4 marcs), 5 gros, 49 grains.
Sous-multiples de
la livre poids de marc |
Système
métrique |
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Le poids de table en usage en Languedoc et autres provinces du sud du royaume servait à peser les choses ordinaires. Il était plus léger que le poids de marc dans une fourchette allant de -15 à -25% suivant les lieux. La livre poids de table se subdivisait en 16 onces.
Sous-multiples de la livre poids de table | Système
métrique |
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Variation du poids de table dans le Languedoc :
Toulouse et Montauban utilisaient la grosse livre
ou livre carnassière qui était une mesure
particulière de ces lieux et valait 3 livres locales. 1 livre
carnassière de Toulouse = 1,224 Kg
Le poids de romaine appelé communément pezon, servait à peser les choses lourdes ou volumineuses.
L'unité utilisée était le
quintal soit 100 livres. Cependant, la livre variant suivant les lieux,
le quintal variait également.
Quintal poids
anciens |
Système métrique |
|
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L'or et l'argent se pesait au poids de marc. Le
diamant se pesait au carat qui était un poids particulier. Il
servait également à peser les perles et les
autres pierres fines pour en déterminer la valeur.
Sous-multiples du
carat |
Rapport au poids
de marc |
Système
décimal |
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Pour peser les drogues et autres plantes, le corps médical français utilisait la livre romaine et cet usage avait été maintenu par l'Édit d'octobre 1557. Cependant, alors que les pharmaciens se conformaient au Codex où les formules étaient rédigées suivant le poids romain (ne pas confondre avec le poids de romaine), les épiciers et droguistes se servaient du poids de marc ce qui augmentait les doses des médicaments d'un sixième s'ils étaient pesés à l'once et de 5 huitièmes lorsqu'on les vendait par livre. Pour prévenir les accidents que risquait d'entraîner l'emploi simultané de ces deux systèmes de poids, la faculté de Paris adopta dans la 5 édition de son Codex publié en 1752 l'usage exclusif du poids de marc mais conserva le nom dragme à celui de gros.
Un arrêt du parlement du 25 juillet 1748 ayant confirmé cette disposition, les prescriptions des médecins et pharmaciens de Paris devinrent uniformes et plus exactes. Les médecins de Montpellier et de quelques autres provinces du sud conservèrent l'ancien poids médicinal au poids de marc car il différait peu de celui du poids de table en usage dans leur pays.
Le 27 pluviôse an X, la
société de médecine décida d'adopter le
système métrique pour déterminer les doses des
médicaments. En exécution de l'article 38 de la loi du 11
avril 1803 un nouveau codex fut rédigé en ce sens. Son
application fut rendu obligatoire dans tout le royaume suivant
l'Ordonnance du 8 août 1816. Les mesures métriques furent
des valeurs approchées des valeurs réelles.
La livre romaine |
Valeurs réelles | Valeurs approchées adoptées pour le codex |
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L'huile était vendue au poids dans des mesures en fer blanc. Il en existait alors deux sortes :celles frappées d'un « M » pour l'huile à manger et celles marquées d'un « B » pour l'huile à brûler. L'unité de mesure pour l'huile était la livre et la plus grosse mesure utilisée pour la vente au détail contenait une quantité d'huile d'un poids d'une livre. Cette mesure se divisait en ½ en ¼ en 1/8e.
Le pain se vend à la marque. La marque de
pain bis ne se divise pas. Elle est de 6 livres et se vend au
même prix que la marque de pain blanc qui est de 5 livres.
Les unités de surface agraire ou forestière portent généralement le nom de « sétérée ou arpent ». Ces surfaces étaient mesurées à l'aide d'une règle appelée « perche ». La perche servant à l'arpentage des forêts était uniforme dans toute la France suivant une Ordonnance des eaux et forêts de 1669. Elle mesurait 22 pieds, 12 pouces.
Ancien
système |
Système
métrique |
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La perche servant à la mesure de l'arpentage des terres variait suivant les différentes coutumes des lieux. La perche de Toulouse mesurait 14 empans de la canne de Toulouse soit 3,14314 m.
Sous-multiple de
l'arpent de
Toulouse |
Système
métrique |
1 hectare = 1,7559 arpent ou 1 arpent 3 pugnères 3 perches 44/100 |
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Quelques exemples de noms et valeurs des sous-multiple de l'arpent suivant les lieux.
Grenade Beaumont de Lomagne |
Montesquieux-Volvestre |
Bagnères
de Luchon |
Léguevin |
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Quelques valeurs de la sétérée ou arpent dans le Languedoc
Valeurs de
quelques séterées |
Système
métrique |
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Il peut sembler curieux de trouver au sein de
cette esquisse consacrée aux poids et mesures un chapitre
traitant de la monnaie. Cela est facile à comprendre : la
monnaie est la mesure qui sert à établir la valeur de
toute chose. L'origine du terme monnaie vient du verbe latin « monère
»
qui signifie « avertir» .
Ce nom fut donné aux
espèces pour leur caractère explicite. Un simple regard
sur ces objets représentatifs
permettait
d'avertir ou de faire connaître à chacun sa valeur
grâce à sa couleur, sa dimension, son empreinte, sa valeur
nominale, et quelques autres renseignements comme l'atelier de
fabrication ou le règne sous lequel ils avaient
été réalisés.
L'origine de la monnaie est impossible à déterminer. Il semble qu'elle fut introduite en Gaule par les Phocéens établis à Marseille. Jusqu'à cette époque, les gaulois utilisaient l'échange. La conquête romaine finira par établir qu'une seule monnaie, celle de Rome.
Lorsque les germains se rendirent maître
des Gaules, ils adoptèrent la monnaie des vaincus tant leur
prestige était immense. Sous les rois de la première
dynastie le monnayage fut extrêmement grossier car les artistes ne
maîtrisaient plus l'art grec et romain. Plusieurs type
d'espèces circulaient et il fallu attendre l'avènement des
Carlovingiens pour remettre de l'ordre. Charlemagne et Louis le
Débonnaire s'efforcèrent d'unifier la monnaie mais cet
effort fut de courte durée à cause du
démembrement de l'empire et de son affaiblissement. Les grands
vassaux ayant conquis une sorte d'indépendance à la
faveur du désordre qui suivit la chute de Charles le Gros (885 -
887), s'attribuèrent tous les droits de souveraineté, et
par suite celui de battre monnaie.
Lorsque Hugues Capet (987 - 996)
monta sur le trône, la monnaie seigneuriale était partout
en circulation. Tout occupé à consolider son
autorité, il ne put imposer une monnaie nationale de sorte que toute
les
monnaies étaient alors purement locale. Elles différaient non seulement
par leur type mais par leur poids car
la livre variait d'un lieu à un autre. La monnaie royale ne commença à
devenir
monnaie d'État qu'à partir du règne de
Philippe-Auguste (1180 - 1223). Ce monarque s'employa à
centraliser la monnaie en la ramenant à un type uniforme. Il fit
frapper les deniers Parisis à Paris et dans les villes
placées sous son autorité mais conserva les deniers
tournois (1) frappés à l'abbaye de
Saint Martin de Tours.
Le denier tournois |
Le denier parisis |
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Son petit-fils Louis IX « Saint-Louis » (1226 - 1270) contribua à établir la suprématie de la monnaie royale en obligeant les seigneurs n'ayant pas de droit monétaire d'utiliser sa monnaie, puis en décidant que les monnaies des seigneurs seraient sans valeur en dehors de leurs terres, enfin en imposant que sa monnaie soit reçue dans tout le royaume. Sous son règne paru le gros tournois, qui était la plus forte monnaie d'argent et valait 12 deniers tournois. Le « sous » cessa d'être une monnaie nominale. Sous Philippe IV Le Bel (1285 - 1314), la livre devint une monnaie réelle et se présentait sous la forme d'une pièce d'or appelé gros royal et valant 20 sous parisis.
Jean II (1350 - 1364) fut à l'origine de la
création du franc d'or ou franc à cheval valant 1 livre
ou 20 sous tournois. Son fils Charles V (1364 - 1380) créa le florin
d'or aux fleurs de lys ou franc
à pied de la même valeur que le franc à cheval.
Charles VI (1380 - 1422) inventa l'écu (2) à la couronne qui
demeura en usage jusqu'à Louis XIII et sur lequel on ne grava
plus que trois fleurs de lys. Anne
de Bretagne, reine de France et mère de Louis XI
(1488) établira l'usage d'indiquer sur les espèces
l'année de fabrication. Louis XI (1461 - 1483) fixa le cours des
monnaies étrangères.
François Ier (1515 - 1547)
(3)
unifiera la monnaie dans le royaume en interdisant aux comtes et
seigneurs locaux de battre monnaie. Henri II (1547 - 1559) émit
une nouvelle espèce d'or que l'on nomma le Henri (4). C'est sous son
règne qu'est apparu le balancier pour frapper les monnaies.
Henri III (1574 - 1589) ordonna la fabrication du franc d'argent. Louis
XIII (1610 - 1643) fit fabriquer les Louis d'or de 10 livres et les
Louis d'argent ou écus blancs de 60 sous.
Louis XIV (1661 - 1715) supprima la livre parisis au profit de la livre tournois. Ainsi il acheva de constituer l'unité monétaire du royaume. Ce ne fut qu'en 1716 sous la régence de Philippe d'Orléans (1715 - 1723) que la banque (5) de France fut créée à Paris et prit en 1718 le nom de Banque Royale.
La
révolution française éteignit les derniers
privilèges monétaire. Au système
duodécimal, établi par Charlemagne, la Convention
substitua le système décimal qui avait l'avantage
d'être en harmonie avec les nouveaux systèmes de poids et mesures.
La fabrication des anciennes monnaies reposait sur trois critères : le poids, le titre et l'empreinte. Elles étaient réalisées dans des métaux précieux. Leur poids, qui est sans doute le plus ancien critère, permettait de maintenir un juste équilibre dans les échanges. Bien qu'il existait une multitude de poids différents, l'unité principale utilisée par la couronne était la livre poids de marc. Cette valeur établie sous le règne de Charlemagne demeurait une unité de compte trop importante pour l'usage quotidien. La livre fut divisée en 2 demi-livres qui prirent le nom de marc, le marc pesant 8 onces contenait 64 gros, 192 deniers ou 4608 grains.
La taille des espèces était
réglée sur le poids de marc.
La taille ne
correspondant pas à la dimension de la pièce, mais
à la quantité d'espèces que le souverain faisait
tirer dans l'unité de poids monétaire. Ainsi le Louis
d'or de 1785 était à la taille de 32 poids de marc
c'est-à-dire que 32 pièces d'or étaient produites
à partir d'un marc d'or. Le marc valant 4608 grains, chaque
Louis devait peser 144 grains ou 2 gros. L'écu était
fabriqué depuis 1726 à la taille de 8 pièces 3/10
au marc soit 555 grains. Les monnaies en billon et en cuivre avaient
également leur taille. Le système décimal et ses
nombreux avantages succèderont à l'ancien système.
La taille des espèces fut réglée sur le
kilogramme.
Le titre d'une monnaie sert à faire
connaître le degré de pureté des métaux d'or
ou d'argent qu'elle contient.
Dans l'origine, les monnaies
étaient en métal pur. Cela présentait plusieurs
inconvénients, dont celui de l'usure et de la fraude. Dans la
suite on ajouta à l'or et à l'argent une certaine
quantité de cuivre afin d'augmenter leur intensité, de
produire une plus belle empreinte moins sujette à l'effacement
et permettre grâce à leur résistance d'être
en circulation plus longtemps avant d'être refondues.
L'importance de ces avantages exigea que les pièces fussent
réalisées en alliage.
Avant l'application du
système métrique aux monnaies, il existait deux
échelles de titre, l'une pour l'or et l'autre pour l'argent. Ces
échelles n'avaient aucun rapport direct avec la division
ordinaire des poids.
L'échelle de l'or se divisait en 24 parties appelées karats
(carats) et chaque carat se divisait en 32 parties appelées trente-deuxième.
L'échelle du titre d'or était composée de 768
parties.
L'échelle du titre de l'argent se divisait en 12 parties
appelées deniers et chaque partie se subdivisait en 24
parties appelées grains. L'échelle
complète du titre d'argent étant composée de 288
parties.
Ainsi, les monnaies
d'or étaient au titre de 24 carats et celles d'argent
au titre de 11 deniers lorsqu'elles ne contenaient que de l'or ou de
l'argent. Cependant, pour être utilisable, les anciennes monnaies
d'or étaient au
titre de 22 carats et celles d'argents au titre de 11 deniers ce qui
faisait pour l'une comme pour l'autre des pièces contenant 1/12e
d'alliage. Dans le système métrique cette proportion fut
ramenée pour les deux espèces à 1/10e d'alliage
pour 9/10 de pur. Le titre fut compté en millième pour
les deux métaux.
Échelle du
titre d'or |
Système
métrique |
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Échelle du
titre d'argent |
Système
métrique |
|
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On distingue deux sortes de valeurs, la valeur nominale et la valeur réelle. La première est décidée par l'état, la seconde par le prix des métaux qui la compose. La valeur réelle (6) ou intrinsèque est sa valeur en poids d'or ou d'argent contenue dans la monnaie. Ainsi une livre tournois d'argent pesant 92 grains 3/6e est à la valeur de 4,89366 g d'argent-métal.
Anciennes espèces d'or | Taille |
Titre |
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Anciennes espèces d'argent | Taille |
Titre |
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Suivant la loi du 16 vendémiaire an II (7
octobre 1793),
l'unité principale des monnaies devait être de 10 grammes
en
or ou argent. Ces deux métaux n'ayant pas la même
valeur, il y aurait eu d'énormes inconvénients à
introduire deux unités monétaires. C'est la loi
du 28 thermidor an III qui fixa le
franc à 5 grammes d'argent-métal, ce poids se rapprochant
au plus près de celui de la livre.
Le 18 germinal an III (7 avril 1795), (d'où la dénomination de "Franc germinal"), le Franc remplaça la Livre. La pièce de 1 franc pesant 5 grammes fut constituée de 9/10 d'argent et de 1/10 d'alliage soit 4,5 grammes d'argent-métal, sa valeur représentait un peu plus de 94 grains. Les décimes sont en billon (alliage d'argent et de cuivre), les centimes sont en cuivre et leurs poids varient suivant leur valeur.
Aujourd'hui 1 franc germinal = le cours actuel de 4,5 grammes d’argent-métal.
Suivant la loi du 7 germinal an II (27 mars 1794), relative à la fabrication des monnaies la taille des pièce d'or, d'argent, de billon et de cuivre avait été établie comme suit :
Espèces d'or | Taille des espèces | Poids |
Titre |
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Espèces d'argent | Taille des
espèces |
Poids |
Titre |
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*pc/Kg : pièces par kilogramme
suivant la loi du 15 septembre 1807
Espèces en billon et cuivre | Taille des
espèces |
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L'arrêté du 13 brumaire an IX (4 novembre
1800), relatif au nouveau système des poids et mesures, fixa,
d'une manière définitive, le rapport des nouveaux poids
avec les anciens et rendit l'exécution de ces mesures
obligatoire dans tout l'empire. Il faudra cependant attendre encore
quelques années avant que les français se familiarisent
avec le nouveau système.
Suivant l'arrêté du Directoire du 26
vendémiaire an VIII :
de livre en franc |
de franc en livre |
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(1)
Pour effectuer des opérations financières
entre villes,
provinces et pays, la monnaie servant de
valeur de référence était la livre
tournois.
Elle tire son nom de
l'abbaye de Saint-Martin de
Tours où l'on frappait des deniers dits tournois.
En
1262, la réforme monétaire de Saint Louis étend le
cours légal de
la livre tournois au royaume. L'Ordonnance d'avril 1667 abolit la livre
parisis au profit de la livre tournois. En 1720, elle sera tout
simplement
appelée «
livre ». Le mot livre tire son nom de son poids en argent
métal.
Avant sa création, les sols étaient les valeurs
monétaires les plus importantes et 20 sols correspondaient
à une livre d'argent.
(2) Le nom d'écu, dont on se servait aussi bien pour désigner une pièce d'or ou d'argent, fut réservé aux pièces de ce dernier métal. Cette dénomination d'écu dérive du latin scutum qui signifie bouclier et sur lequel les anciens rois de France faisaient peindre ou graver leurs armoiries. Ces armoiries étant par la suite gravées sur les monnaies, ces dernières prirent le nom d'écu. Dès lors, le mot écusson sera employé pour désigner le côté de la pièce opposé à celui de l'effigie et représentera les armes du souverain. C'est sous le règne de Louis VI que les premières fleurs de lys apparaîtront sur les monnaies.
(3) François Ier réorganisa les ateliers monétaires et accorda à 25 villes le droit de battre monnaie. L'atelier de fabrication de Toulouse sera supprimé avec 12 autres par l'Édit de février 1772. Avec la création des assignats, tous les ateliers furent supprimés par la loi du 6 pluviôse an II (25 janvier 1794) sauf celui de Paris. Cependant la loi du 22 vendémiaire an IV (14 octobre 1795) en rétabli huit dont celui de Toulouse pour la fabrication des monnaies de cuivre.
(4) L'usage de donner aux monnaies le nom du souverain ne remonte qu'au règne de Henri II (1547). On le donnait indistinctement aux monnaies d'or et d'argent mais à compter du règne de Louis XIII, seules espèces d'or porteront le nom du roi.
(5) L'étymologie du mot banque vient de l'italien banca qui deviendra banco puis banque. Anciennement en Italie, le change et le commerce d'argent se faisaient en place publique et ceux qui négociaient ces affaires étaient assis sur des bancs sur lesquels ils comptaient leur argent et rédigeaient les lettres et billets de change. Ils furent appelés banquiers.
(6) Pour faire face le plus souvent aux dépenses de guerre, plusieurs rois séduits par les apparences trompeuses d'un bénéfice momentané eurent recours à l'affaiblissement de leur monnaie c'est-à-dire à l'augmentation de la proportion du cuivre au détriment du pur. Les conséquences furent désastreuses. L'éloignement de la proportion de poids ou d'alliage ordinaire donna lieu au discrédit général des espèces. Il favorisa l'introduction de la fausse monnaie et participa au renchérissement des denrées, à la diminution des revenus et à l'anéantissement du commerce. Ce fut le cas sous le règne du roi Jean II (1350 - 1364) au cours duquel le cours des monnaies fut livré à des fluctuations désastreuses.
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