les maréchaux

L'office de maréchal
Son origine

Le mot maréchal est dérivé des deux anciens mots allemands mare = cheval et scalck = serviteur. Ce nom fut d'abord donné à ceux qui avaient le soin des chevaux. Les maréchaux étaient à l'origine les premiers écuyers du Roi. Le prestige et les prérogatives de ces officiers prendront d'autant plus d'importance que le pouvoir du connétable sera considérable. À leur tour ils deviendront officier supérieur et seront directement placés sous les ordres du connétable. Ils les seconderont dans leur rôle de justice en recherchant et en ayant connaissance de tous les crimes commis dans les armées.

Après la suppression de la dignité de grand sénéchal de France, le titre de Connétable a été attaché à la grandeurMaréchal de France vers 1500 de la monarchie et plus particulièrement à la puissance de nos Rois. Le titre de Maréchal de France s'est lui aussi forgé dans le temps. Il semble que cette dignité soit devenue une dignité militaire avant celle du connétable car cet officier commandait déjà l'avant-garde des armées de Philippe II Auguste (1180 - 1223) sous les ordres du grand sénéchal de France. Il prenait alors le titre de Maréchal du roi ou maréchal de l'Ost Voir glossaire( de l'armée). Lorsque l'office de grand sénéchal de France disparue définitivement en 1218 et fut remplacée par celui de connétable, la dignité de maréchal prit beaucoup plus d'importance. Pour distinguer les maréchaux de la couronne des autres maréchaux dépendants de seigneurs féodaux, Philippe-Auguste créera la dignité de maréchal de France en 1185. Albéric Clément, seigneur du Metz, fut le premier à porter ce titre. Robert Albéric et Henri Clément qui avaient les faveurs de Philippe Auguste, donneront une importance de plus en plus grande à l'office de Maréchal de France qui n'avait jusqu'alors l'inspection sur les gens de l'écurie du Roi. Cette dignité ne fut jamais héréditaire.

Devenues premières charges de la couronne, le connétable et le maréchal de France eurent le commandement en chef des armées avec tout pouvoir et autorité sur les gens de guerre. À ce titre, ils disposeront d'une juridiction contentieuse connue sous le nom de Connétablie et Maréchaussée de France au siège de la Table de Marbre du Palais à Paris. Cette juridiction était chargée de juger les faits de discipline, récompenser les vertues héroïques, payer les gages et soldes et juger des crimes entre les gens de guerre. En 1679, un Édit du 22 août, appelé Édit des Duels attribuait aux maréchaux de France et privativement à tout autre juge la connaissance de tous les différends entre gentilshommes ou ceux qui font profession des armes dans le royaume et sont victimes de propos outrageants ou autres causes touchant le point d'honneur.


Les lieutenants du connétable

Considérés comme les lieutenants du connétable, ils recevront à leur tour les marques honorables de leur pouvoir et auront le commandement général sur la noblesse et la milice. François Ier ne voulu pas exempter son fils ainé, Daufin de France et duc de Bretagne de ce pouvoir absolu et lui adressa à le veille de son départ pour le camp d'Avignon : « Vous allez mon fils avec mon bon congé, & d'une affection & desir que je ne blame en vous, apprendre un mestier que, pour l'attente à laquelle vous estes nourry, il est requis & necessaire que vous sachiez. Vous trouverez là Monsieur de Montmorency, Maréchal de France & avec luy plusieurs bons capitaines, à luy vous direz particulièrement comme vous allez là, non pour commander à présent, mais pour apprendre à commander au temps à venir. »*
Ils auront le commandement en chef des armées et exerceront leurs pouvoir et autorité sur les gens de guerre sous l'autorité du connétable. Avec le connétable dont il formeront un seul corps, ils disposeront d'une juridiction connue sous le nom de  « Connétablie et Maréchaussée de France ».

* Mémoires de Guillaume du Bellay

Les cousins du roi

Devenus grands officier de la couronne, c'est le roi Henry II qui, le premier honora les Maréchaux de France de la qualité de « Cousin du Roy » dans toutes les ordonnances, édits et autres lettres. Ce titre ne leur était pas exclusivement réservé et d'autres grands seigneurs pouvaient également s'en prévaloir. Cependant, toute la noblesse devaient s'adresser aux maréchaux en usant du titre de monseigneur et d'excellence même si l'auteur du courrier était de la plus grande naissance et pouvait se prévaloir de distinctions particulières.
Les maréchaux de France étant par état chargés de veiller à la conduite de la noblesse, cette dernière ne devait en aucun cas s'écarter à leur égard de ce cérémonial indispensable. Le pli de ceux qui dérogeaient à cette règle, était remis au tribunal de la connétablie qui décidait systématiquement de le renvoyer sans réponse à son auteur. Dans le meilleur des cas, ce dernier se voyait blâmé pour cette irrévérence, les plus récalcitrants s'exposaient à une peine d'emprisonnement(1).


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La dignité de la charge
Leurs armes

Le bâton fût souvent employé comme symbole du commandement. Ainsi, le roi portait un bâton ou sceptre sur lequel on plaça au XIV siècle une main de justice, le bâton de l'évèque reçu la crosse. Le bâton du maréchal de France avaient le même sens. On en fait remonter l'origine à Philippe Auguste qui, pour confirmer sa décision de faire du maréchalat non plus unBlason des maréchaux emploi domestique mais un office militaire, remit à cette occasion entre les mains du dignitaire son bâton en signe de commandement.
Ce bâton,  long de 50 cm et d'un diamètre de 45 millimètres est recouvert de velours de soie bleu d'azur. Il fut orné sous les Bourbons de 20 fleurs de lis d'or, sous Louis Philippe de 20 étoiles d'or et sous l'Empire de 20 abeilles d'or. Chacune des extrémités du bâton est garnie d'une calotte en vermeil. L'une porte l'écusson des armes de France et l'autre le cartel armorié du maréchal.

Les armes des maréchaux étaient formées de deux bâton de commandement azur semé de fleurs de lys d'or, se croisant à l'arrière d'un écu central sur lequel chaque maréchal rajoutait ses propres armes. L'ensemble étant surmonté de la couronne ducale.


Le serment

Les maréchaux à qui les rois avaient confier le droit de justice sur  les gens de guerre possédaient ce droit comme fief et à titre d'inféodation en faisaient foi et hommage au Roi. Lorsque le souverain créait un Maréchal de France, il lui faisait jurer fidélité suivant le serment établit par l'Ordonnance du 13 janvier 1373 :

«Vous jurez Dieu nostre créateur, sur la foy et la loy que vous tenez de luy, et sur vostre honneur, que bien etparchemin maréchal loyaument vous servirez le roy cy présent en l'office de mareschal de France, duquel ledit seigneur vous a cejourd huy pourveu, envers tous et contre tous qui pourrout vivre et mourir sans personne quelconque en excepter, et sans aussi avoir aucune intelligence ne particularité avec quelque personne que ce soit au préjudice de luy et de son royaume.

Et que si vous entendez chose qui luy soit préjudiciable, vous la luy révélerez, et que vous ferez vivre en bon ordre, justice et police les gens de guerre, tant de ses ordonnances qu'autres qui sont et pourront estre après à sa solde et service, que vous les garderez de fouller et oppresser le peuple et subjects dudit Seigneur, et leur ferez curieusement garder et observer les ordonnances faites sur lesdits gens de guerre, que vous irez et vous transporterez par toutes les provinces dudit royaume, pour voir et entendre comme iceux gens de guerre vivront et garderez et défendrez de tout vostre pouvoir, qu'il ne soit fait aucune oppression ou molestie au peuple.

Et jurez au demeurant que de vostre part vous garderez et entretiendrez les dites ordonnances en tout ce que vous sera ordonné selon icelles, et de faire en tout et par tout ce que touche et concerne ledit office de mareschal de France, et tout ce qu'un bon et notable personnage qui en est pourveu comme vous estes présentement, doit estre tenu de faire.
Et en signe de ce pour mieux exécuter ce que dessus ledit seigneur roy vous fait mettre en la main le baston de mareschal, ainsi qu'il a esté accoustumé de faire à voz prédécesseurs. »


Leur nombre

Sous Philippe II Auguste il n'y eut qu'un seul maréchal de France lorsque le commandemant de l'armée fut attaché à cette dignité. Saint-Louis en créa un second lorqu'il partit en croisade en 1270. François Ier en créa un troisième, son fils Henri II un quatrième et François II un cinquième. Il fut décidé aux états de Blois tenus sous le règne de Henri III que le nombre de maréchaux serait fixé à quatre. Henri IV s'affranchira de cette loi et augmentera leur nombre. Louis XIII fera de même et Louis XIV portera leur nombre à seize en 1661. En 1793 ils étaient onze.
Napoléon en fixa le nombre à dix-huit et sous la restauration, le Roi le réduisit à douze.

Sous Louis XIV, les officiers de marines furent à leur tour récompensés par le bâton de Maréchal. La grandeur de cette dignité fût, sous son règne, un sujet de discorde lorsque celle de Maréchal général des camps et armées du Roi lui disputa la place. Les uns voulant commander aux autres. C'est ainsi que le Maréchal de Créquy refusa de servir sous les ordres du Maréchal général des camps et Armées du roi le vicomte de Turenne. Cette insubordination lui valu d'être disgracié et une bataille juridique et historique s'engagea. Elle s'éteindra avec la mort de Turenne.


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L'officier de la couronne
Le maréchal-doyen

Après le décés du Connétable de Lesdiguieres, Louis XIII supprima par édit de janvier 1627 l'office de connétable. La juridiction de la connétablie fut alors exercéeBlason du doyen des maréchaux uniquement par les maréchaux de France et présidée par le plus ancien, qui représentait le connétable. Il prit le nom de Maréchal-Doyen. Pour le distinguer des autres Maréchaux, l'écusson des armes du Maréchal-Doyen fut décoré sur le côté droit, d'une épée nue et sur le côté gauche d'un bâton d'azur semé de fleurs de lys d'or soutenu par deux mains droites ou un dextrochère gantelé.

Les prérogatives attachées à sa fonction et les honneurs dus à son rang furent identiques à ceux du connétable. La compagnie des gardes de la connétablie fut attachée à sa personne et montait journellement la garde à son Hôtel. Ce corps-de-garde était composé d'un lieutenant, d'un exempt, de six gardes, d'un brigadier et un sous-brigadier. Il accompagnait le Maréchal-Doyen dans ces déplacements. C'était au Maréchal-doyen qu'appartenait l'initiative de convoquer tous les autres Maréchaux pour tenir tribunal afin de connaitre et juger sans appel tous les différends entre gentilshommes et personnes se trouvant en possession d'armes.

Pour leurs funérailles, le grand-prévôt se rendait en grand uniforme à l'hôtel du maréchal défunt où il mettait en place un corps-de-garde de douze hommes sous les ordres d'un exempt. Quatre gardes étaient mis en sentinelle autour du catafalque jusqu'au moment de l'enterrement. Le jour des funérailles, le reste de la compagnie se joignait à la cérémonie. Tous les Maréchaux assistaient au convoie suivis du grand-prévôt marchant immédiatement après et tenant l'épée nue du défunt garnie de crêpes. Le reste du convoi était composé des parents et amis de la famille.

Dans son Ordonnance du 28 avril 1778, le roi confirma le droit qu'ont toujours eu les Maréchaux de lui présenter les sujets qui leur semblaient apte à remplir les fonctions de Prévôts Généraux, de lieutenants et sous-lieutenants de maréchaussée. Ce droit de présentation sera déféré au maréchal-doyen qui était à même de bien connaitre ces personnels par le biais de la correspondance que tous ces officiers étaient obligés d'entretenir avec lui.
Lorsque le Roi tenait en personne un Lit-de-Justice, les Maréchaux étaient convoqués pour y assister.

Suppression

Un décret du 11 septembre 1790 supprima le tribunal des maréchaux, celui du 16 février 1791 supprima les compagnies à leur suite. Le décret du 20 mars suivant réduisit le nombre des maréchaux de France à six et leur traitement fut fixé à 30 000 livres. Enfin un décret du 26 février 1793 supprima le grade de Maréchal de France.


Les maréchaux d'Empire

En l'an XII, (1804), Napoléon Bonaparte rétablit cette dignité sous le nom de maréchal d'empire et choisit pour laMaréchal d'empire remplir, les généraux qui s'étaient le plus distingués au cours des guerres de la révolution.
La dignité de maréchal d'empire fut établie par le sénatus-consulte organique du 28 floréal an XII.  Le titre VI porte : « Les grands officiers de l'empire sont : 1) les maréchaux de l'empire choisis parmi les généraux les plus distingués. Leur nombre n'excède pas celui de seize ; ne font point partie de ce nombre les maréchaux qui sont sénateurs. Les places des grands officiers sont inamovibles... ».

Sur les seize places de maréchaux destinées aux généraux en activité, Napoléon en conféra quatorze immédiatement et en garda deux pour récompenser les mérites futurs. Ces quatorze bâtons furent donnés aux généraux Jourdan, Berthier, Masséna, Lannes, Ney,  Augereau, Brune, Murat, Bessières, Moncey, Mortier, Soult, Davoust et Bernadotte.

L'empereur ne restitua pas aux maréchaux les attributions qu'ils avaient antérieurement à 1791 sur les affaires générales de la guerre et sur la justice militaire en particulier. Il estimait que les divers commandements qu'il confierait à ses maréchaux les tiendraient éloignés de la capitale et se seraient opposés à ce que leur tribunal eût une action constante et régulière, mais Napoléon voulait surtout que son pouvoir fût sans partage et que sa volonté devînt la loi suprême.

Napoléon accorda aux maréchaux des prérogatives analogues à celles qui avaient été réglées par Louis XIV. Indépendamment des honneurs militaires qu'il est prescrit de rendre aux maréchaux dans l'étendue de leur commandement, le maire et les adjoints devaient se trouver à leur logis avant qu'ils n'arrivent et devaient prendre congé d'eux au moment de leur départ ; un détachement de garde nationale les attendait à l'entrée de la ville.
Les cours royales, les autres cours et les tribunaux se rendaient chez eux en corps.



(1) Ce cérémonial, consacré par le devoir et la reconnaissance fut transgressé à plusieurs reprises ce qui n'était pas du goût des rois et des Correspondancemaréchaux qui accordaient une très grande importance au rangs et aux dignités. Louis XIV enjoigna expressément à ses maréchaux de punir ceux qui voudraient s'en exempter. En février 1762, Louis XV déclara sa volonté de maintenir ce cérémonial et le tribunal des maréchaux prit le 24 juin 1763 un arrêté rappelant aux gentilshommes et officiers militaires, de quelque rang et dignité qu'ils soient, qu'ils devaient utiliser le terme de monseigneur lorsqu'ils écrivaient à un maréchal de France et que ceux qui ne se conformeraient pas à ce règlement feraient non seulement l'objet d'une réprimande de la part du tribunal, mais leurs courriers seraient retournés sans réponse.

Quelques seigneurs de la plus grande naissance crurent pouvoir s'en dispenser. Le marquis de Monpezat l'apprit à ses dépends. Revêtu d'un brevet de duc du Pape, il s'était autorisé à adresser sa lettre à monsieur le maréchal. Ce courrier lui fut renvoyé sans réponse. Le marquis, s'obstinant dans son refus sous prétexte des privilèges attachés à son titre, fut arrêté le 10 octobre 1764 et conduit en prison jusqu'à ce qu'il eût écrit une lettre d'excuse. Il sortit de prison que le 20 novembre suivant.

Cet arrêté fit l'objet de vives critiques de la part des grandes maisons qui par leur ancienneté, l'éclat de leur nom et leurs privilèges se coyaient au-dessus des règles imposées au reste de la noblesse. Dans un mémoire du 20 octobre 1767 adressé au roi et au tribunal des maréchaux de France, elles exposaient, qu'ayant l'honneur d'être traité de cousin par sa majesté, elles se croyaient en droit de ne pas employer le terme de monseigneur. Les maréchaux décidèrent de s'en remettre à la justice du roi qui, pour mettre un terme à ce débat, confirma que « le titre de cousin accordé aux Familles qui ne sont ni Pairs ni Ducs, ne doit pas les dispenser de se conformer au cérémonial réglé en faveur de MM. les Maréchaux de France, par les décisions anciennes des rois nos prédécésseurs ».


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