![]() |
![]() |
La création de prévôts
chargés de l'exercice de la
justice au sein
des armées, fut ordonnée en 1534 par François Ier.
Ils
furent appelés
"prévôts de l'armée". Le Roi leur assigna quinze
livres par mois de
gages, et aux archers sept livres, dix sous. Outre
leur solde, ils jouissaient de certains droits particuliers, et avaient
les mêmes libertés, privilèges et franchises que
les prévôts des
maréchaux.
Pour exercer leur office, ils recevait du Roi une lettre de
Provision et de Commission. Ces officiers aidés de leurs archers,
devaient instruire les
affaires
de vol, de meurtres ou de violences qui se commettaient en garnison
ou à l'occasion des déplacements de la troupe. Il
était de leurs
devoirs
de chasser et châtier les filles de joie, et les goujats qui
étaient à
la suite des compagnies. Ils pouvaient proposer aux
généraux commandant
les armées, des
règlements et
ordonnances de police. Ils devaient empêcher dans les
armées, les duels
et les jeux de
hasard. Les capitaines et soldats étaient tenus de leur
obéir en tout
ce
qu'ils leur ordonnaient pour la justice. L'auteur d'injures, d'outrages
en parole ou par geste à leur égard était puni de
mort.
Tout délit qui avait lieu aux armées ou dans les troupes
était tenu
pour délit flagrant et prévôtal. Aux armées,
la cour prévôtale était
composée du prévôt, d'intendants et de
capitaines, à la suite des compagnies, avec les juges du lieu.
Depuis la campagne de 1744, la prévôté générale était en charge de fournir des détachements en campagne pour la police des camps. Ces derniers étaient aidés dans leur tâche, par la maréchaussée provinciale. Lorsque la loi du 6, 7 et 11 septembre 1790 supprima le siège de la Connétablie, l'assemblée organisa des détachements de gendarmerie chargés de la police des armées. Renouant avec la tradition, la loi du 18-23 mai 1792 institua une force publique pour l'exécution des jugements des Cours Martiales et pour veiller au maintien de l'ordre dans les camps. Ces détachements composés d'un capitaine et de 32 hommes montés avaient été établis à la suite de chaque armée. Mais ces effectifs se révélèrent insuffisant et une loi des 30 avril - 21 mai 1793 les augmenta. Ils furent portés à 150 hommes et placés sous les ordres d'un lieutenant-colonel. Après la paix de Bâle, la loi du 28 germinal an III supprimait les divisions de gendarmes à cheval organisées pour le combat. Les plus aptes furent employés à la police des camps et des armées, les autres reprenaient leur place dans les brigades. Par l'arrêté du 18 nivôse An IV (8 janvier 1796), le directoire réduisit l'effectif des détachements.
Dans la loi relative à l'organisation de
la gendarmerie nationale du 28
Germinal an VI, le Conseil des
Cinq-cents confiait précisément cette mission au corps de
la
gendarmerie nationale. S'il était devenu un
instrument au service des populations, il n'en demeura pas moins un
dispositif capable de s'opposer aux désordres engendrés
par les
soldats. L'article 215 de cette loi, prescrivait que " outre
le service dont il est chargé dans l'intérieur de la
république,
le corps de la gendarmerie nationale fournira en temps de guerre, des
détachements destinés au maintient de l'ordre et de la
police dans
les camps et cantonnements."
Structurée,
hiérarchisée, soldée, encadrée, la toute
nouvelle
République qui menait la guerre sur le sol étranger
n'entendait pas que
ses troupes se livrent à la dépravation, à la
"pillerie" aux violences
gratuites envers les populations et cela au mépris des
tous nouveaux droits de l'homme. Par son action, elle apportait la
liberté et non la désolation ou la misère. Ses
troupes étant le bras
armé de cet idéal, ne devaient par leurs mauvaises
actions jeter
l'opprobre sur la France
en lui apportant le déshonneur. La République
étant une et indivisible,
ses
lois devaient s'appliquer à tous ses citoyens même qu'ils
fussent
soldat et
hors de France.
Cette loi sera suivie en l'an VII par une
instruction du 29 floréal due au général
Wirion,
suivant
laquelle la
force publique serait distribuée en proportion de la force de
chacune
des divisions et en fonction de leurs positions. Ce principe sera
conservé durant le Consulat et l'Empire.
Le service de ces formations prévôtales
fournis aux armées en temps de guerre, avait pour but d'assurer
le
maintien de
l'ordre et la police des camps et cantonnements. Le commandant
de cette force publique étant placé sous les ordres
directs du chef
d'état-major général de l'armée, le service
de ces gendarmes était le
suivant :
La loi des 18-23 mai 1792 qui avait institué une force publique en campagne après la suppression des juridictions prévôtales (loi des 6-7-11 septembre 1790) n'avait accordait aucun pouvoir judiciaire aux officiers de gendarmerie. Ces derniers ne furent chargés que d'assurer l'exécution des jugements des cours martiales en 1793 puis des conseils de guerre institués en l'An V. Dans les faits, et plus particulièrement durant les guerres de la Révolution et celles de l'Empire, la constitution des conseils de guerres pour juger des infractions légères était disproportionnée. Il fallait cependant, que ces fautes soit jugés pour éviter que les faits ne s'enveniment et ne dégénèrent. Il fut alors institué un tribunal prévôtal dans chaque quartier général. Ce tribunal tirait sa légitimité de l'instruction du 29 floréal An VII qui précisait que « tous vivandiers, hommes de peine et autres suivant l'armée, qui seront trouvés en contravention aux ordres du général en chef ou des généraux commandant les divisions, seront conduits au commandant de la force publique, pour être ensuite punis suivant l’exigence des cas ». Les grands prévôts et prévôts exercèrent ces pouvoirs judiciaires en compléments des jugements rendus par les conseils de guerre. Leur action fut réglementée par l'ordonnance du 8 mai 1832 sur le service des armées en campagne et par le décret du 1er mars 1854 sur l'organisation et le service de la gendarmerie. Le code de justice militaire du 4 août 1857, viendra donner aux tribunaux prévôtaux, une existence légale.
Avec quelques variantes, apportées par tous les
gouvernement qui se succèderont, mais toujours dans le but de faire
régner l'ordre et la discipline au sein de la troupe et protéger les
populations des pays contre tout acte de violence ou de pillage,
l'instruction du 18 avril 1890 précisera avec méticulosité le rôle, la
méthodologie et le cadre juridique dans lequel devaient se dérouler les
jugements prévôtaux.
Cette instruction énonçait la double mission judiciaire dévolue à la
gendarmerie aux armées.
Ces tribunaux pouvaient juger et prononcer des peines pour :
Il est à noter que les individus employés, à quelque titre que ce soit, dans les états-majors ou dans les administrations et services qui dépendaient de l'armée, n'étaient justiciables que des conseils de guerre* (ex. secrétaires, interprète...etc). Ces tribunaux étaient alors constitué d'un officier de gendarmerie assisté d'un greffier choisi parmi les sous-officiers et brigadiers de gendarmerie. Il pouvait se tenir n'importe où, même dans un champ du moment qu'il y avait un délinquant à juger.
* Le Code de justice militaire du 9 mars 1928 remplacera l'appellation «conseil de guerre» par celle de «tribunal militaire».
Comme sous l'ancien régime, qui avait
titré de grand
prévôt le prévôt du
connétable et de prévôt
celui
des maréchaux de France, le directoire, dans leur instruction du
29
floréal,
donna au général ou au colonel commandant
l'ensemble des troupes de gendarmerie détachées le titre
de grand
prévôt, et à l'officier qui commandait
la gendarmerie au sein d'un corps d'armée celui de prévôt.
Cette terminologie sera enrichie un peu plus tard d'un troisième
degré,
celui de commandant des forces publiques pour les niveaux de la
division et brigade.
Depuis cette date, tous les textes qui ont réglé le
service de la
gendarmerie aux armées en ont repris le précepte. Ainsi,
Louis Philippe
Ier précisera dans son Ordonnance
du 3 mai 1832
(Art. 169)
que la
gendarmerie remplit à l'armée des fonctions
analogues à
celles qu'elle exerce dans l'intérieur. La surveillance des
délits,
la rédaction des procès-verbaux, la poursuite et
l'arrestation des
coupables, la police, le maintien de l'ordre, sont de sa
compétence
et constituent ses devoirs. Il conservera les termes de Grand
prévôt et de Prévôt et
énoncera clairement leurs
attributions à l'article 171 :
Les attributions du grand prévôt embrassent tout ce qui
est
relatif aux crimes et délits commis dans l'arrondissement de
l'armée. Son devoir est surtout de protéger les habitants
du pays
contre le pillage ou tout autre violence.
Les prévôts ont les
mêmes attributions.
Sous le second Empire, Napoléon III conserva et
adapta ce
service spécial dans son décret
du 1er
mars
1854. En 1857, les législateurs, dans un soucis de concilier
le
droit
et la spécificité militaire, les définiront
précisément dans le Code de
justice
militaire. Il déterminera et encadrera le rôle et les
missions de la
gendarmerie aux armées. Pour faciliter l'application de ces
textes, le
service prévôtal de la gendarmerie sera
complété le 18 avril 1890 par
une instruction particulière.
Outre sa mission judiciaire, la prévôté
devait veiller à ce
que les voies de communication ne soient pas encombrées, elle
était
chargée d'interpeler les militaires s'éloignant du champ
de bataille,
les déserteurs, de diriger les blessés vers les poste
sanitaires, de
protéger les blessés et prisonniers de guerre, de
s'opposer au pillage,
au dépouillement des morts. Après les combats, c'est elle
qui
recherchait les blessés des deux armées et leur assurer
les soins
nécessaires, faisait enterrer les morts après
constatation de leur
identité et faisait récupérer les armes et
munitions abandonnées.
Succédant au décret du 1er mars 1854, le décret organique du 20 mai 1903, permit une nouvelle fois de réunir dans un seul texte l'ensemble des dispositions relatives à l'organisation et aux services de la gendarmerie. Son service aux armées y fut définit comme faisant partie des ses missions fondamentales et fut d'ailleurs précisé dans son titre préliminaire en ces termes : La gendarmerie est une force instituée pour veiller à la sûreté publique et pour assurer le maintien de l'ordre et l'exécution des lois... Son action s'exerce dans toute l'étendue du territoire, quel qu'il soit, ainsi qu'aux armées.
Du tribunal de la Connétablie qui jugeait les infractions militaires, à celui de la prévôté créé pour juger les "excès, crimes et oppressions" commis par les militaires envers les populations, complétés par les conseils de guerre chargés de juger les manquements à la discipline et des différends entre militaires, le législateur n'a eu de cesse de faire converger le code de justice militaire et le code pénal. D'autres notions, dues à l'évolution du droit international et du droit des conflits armés introduiront des différenciations qui amèneront le législateur à redéfinir l'organisation des prévôtés ainsi que ses missions et son service.
S'appuyant sur le code de procédure pénale, le code de justice militaire, la loi du 24 mars 2005 portant statut général des militaires et le décret de la même année portant organisation générale de la gendarmerie nationale, la prévôté est toujours défini comme étant un service particulier de la gendarmerie nationale institué auprès des forces armées françaises stationnées ou en opération hors du territoire national. Les missions des gendarmes, toujours appelés "prévôt", sont de deux ordres.
Les forces prévôtales déplacées sont sous l'autorité d'un officier supérieur qui prend le nom de "commandant de la prévôté". Suivant l'importance des forces projetées et les difficultés du terrain, cet officier dispose d'une ou plusieurs brigades prévôtales. Les forces françaises étant actuellement projetées dans plusieurs pays dans le monde, les commandants des prévôtés de ces différentes forces sont sous les ordres d'un "commandant de la force prévôtale" qui est un officier supérieur ou général auprès du directeur général de la gendarmerie.
Conformément au code de justice militaire, les
gendarmes toujours appelés "prévôt", exécutent aux armées, des missions
de police judiciaire et de police générale. Leur action été jusqu'à
présent, placée sous
le contrôle des magistrats du tribunal aux armées de Paris (TAAP). Ce
tribunal qui a succédé au tribunal des forces armées (TFA) de Paris, a
été créé par une loi du 10 novembre 1999. Il applique les règles de la
procédure pénale de droit commun, à deux différences près : aucune
poursuite ne peut-être engagée, sauf en cas de crime ou délit flagrant,
sans l’avis consultatif du ministre de la Défense et les victimes ne
peuvent citer directement l’auteur d’un fait devant le tribunal.
Les fonctions de juge sont exercées par des magistrats
appartenant à l’ordre judiciaire, désignés par décret tous les ans. Ils
ne sont pas affectés à titre permanent contrairement au
procureur, au substitut et au juge d’instruction qui sont détachés par
le ministère de la Justice pour trois ans au ministère de la Défense.
Le greffe, est composé de militaires de carrière recrutés par concours
spécial parmi les sous-officiers des trois armées.
Les prévôts peuvent soit d'initiative ou sur instruction de ces magistrats, réaliser des enquêtes judiciaires à l'occasion d'infractions commises par les militaires mais aussi contre les forces françaises. Dans ce cas et selon les accords internationaux, les infractions dans lesquelles sont impliquées les populations locales seront instruite suivant les règles de procédure et de droit local sans pour autant exempter les militaires français d'éventuelles poursuites suivants les lois et règlements de notre pays.
|
|
|
|